Jean 20, 1+11-18

Marie-Madeleine au tombeau de Jésus

France Quéré

Les femmes de l’Evangile, p. 46s

          Marie-Madeleine est partie seule avant le jour ; l’ombre crépusculaire, la douleur, la pierre enlevée, le corps absent, la solitude du jardin épaissit sa détresse. Elle court se réfugier auprès des disciples Pierre et Jean.

          Quand on la retrouve auprès du tombeau, elle est debout et sanglote, comme si elle était au pied de la croix. La passion, pour elle, continue dans l’affrontement du corps disparu. Elle voit deux anges vêtus de blanc, assis là où reposait le corps de Jésus, l’un à la tête, l’autre aux pieds. Ils lui disent : Femme, pourquoi pleures-tu ? Sa détresse est si profonde quelle chasse toute frayeur. Pas un signe de crainte dans ce récit, ni même de surprise. Les deux anges ne l’étonnent pas, malgré leur habit blanc et leur emplacement symbolique. La douleur a tout envahi.

          On a enlevé mon Seigneur, répond-elle, et je ne sais pas où on l’a mis. On comprend alors la douleur de son chagrin.

          Elle ne pleure pas seulement la mort de Jésus, mais la disparition d’un corps. Elle venait accomplir d’ultimes devoirs, elle en est empêchée. D’où ce flot de tristesse que n’éclaire aucune lueur de foi.

          Se retournant, elle aperçoit Jésus qui se tenait là, mais sans savoir que c’était lui. Voilà le troisième secours offert à sa foi, après le tombeau vide et les anges en tenue réglementaire. Ses yeux vont-ils enfin s’ouvrir ? Pas si vite ! Cet évangile est plein de patience. Jésus essaie de l’aider, orientant la question sur lui-même : Qui cherches-tu ? Et elle persiste dans le deuil, c’est-à-dire dans l’incrédulité. A celui qu’elle prend pour le jardinier, elle redit obstinément sa souffrance avec les mots naïfs de la possession et du découragement : Seigneur, si c’est toi qui l’as emporté, dis-moi où tu l’as mis et j’irai le prendre. Marie prétend soulever Jésus toute seule ! Est-il devenu chose si légère ? Est-il la drachme perdue ? Et pourquoi le jardinier aurait-il profané son corps ? Jésus n’est pas le jardinier, mais c’est bien lui qui a enlevé le corps ! Quant à dire où il l’a mis, cela va être fait tout de suite.

          Jésus se révèle en effet en la nommant : Marie ! Nommer convoque et appelle à l’obéissance. Les trois premières incitations à la foi avaient égarée Marie-Madeleine ; celle-ci a-t-elle touché juste ? Oui, Marie reconnaît Jésus et s’écrie en hébreu : Rabbouni !