Actes 20, 1-16

Paul avait prolongé l’entretien jusqu’à minuit !

Origène

Philocalie sur les Ecritures, SC 302, p. 289s

          A Troas, Paul prolonge l’entretien très tard, jusque vers minuit ! L’Ecclésiaste dit : Mon fils, garde-toi d’écrire beaucoup de livres ; et le livre des Proverbes ajoute : Par la prolixité, tu n’éviteras pas le péché, mais en ménageant tes lèvres, tu seras sensé ! Est-ce que dire beaucoup de paroles, c’est parler de façon prolixe, même si l’on dit beaucoup de paroles saintes et salutaires ? Comment un enseignement peut-il être efficace sans cette prolixité comprise au sens simple ? La sagesse elle-même n’a-t-elle pas affirmé à ceux qui se perdent : J’ai prolongé mes paroles et vous n’avez pas prêté attention. Et de son côté, Paul semble avoir passé tout le jour du matin, jusqu’à minuit, à enseigner, quand le jeune Eutyque, accablé d’un sommeil profond, tomba et troubla les auditeurs, comme s’il était mort.

          Si donc la phrase, Par la prolixité tu n’éviteras pas le péché, est véridique, si véridique aussi est le fait que ceux qui ont beaucoup parlé, tel Salomon, n’ont pas péché, pas plus que Paul n’a péché, lui qui a parlé tout un jour et jusqu’à minuit, demandons-nous ce qu’est la prolixité.

          La Parole totale de Dieu, Parole qui était déjà au commencement auprès de Dieu, elle n’est pas prolixe. Elle n’est pas des paroles, elle est un parole unique, constituée de multiples idées et chacune de ces idées est une partie de la Parole complète. En revanche, celles qui, hors de celle-ci, font profession de contenir rapports et exposés sur quelque sujet que ce soit, même si elles sont des paroles sur la vérité, eh bien, ce que je vais dire est inattendu, aucun d’elles n’est une parole, et chacune d’elles est des parole. Ce n’est pas du tout l’unité ; parce qu’il y a arrachement et opposition, elles ont perdues l’unité et elles sont devenues nombres, et peut-être nombres à l’infini. Aussi, selon cette règle, pourrions-nous dire : celui qui proclame quoique ce soit d’étranger à la piété, celui-là parle de façon prolixe, mais celui qui dit la vérité, même s’il dit tout sans rien laisser de côté, celui-là dit continûment une parole unique. Et les saints qui s’en tiennent à la visée conforme à la Parole unique ne parlent pas de façon prolixe. Si donc la prolixité se juge aux doctrines, et non pas à l’énoncé de beaucoup de mots, ne pouvons-nous pas dire ceci : tous les livres saints sont un livre unique. En dehors d’eux, les autres sont multiples.