Tite 1,7-11+2,7-8 ou Actes 20,17-36

Martin, moine et évêque

Luce Piétri

Histoire des saints et de la sainteté chrétienne, tome 3, p. 214s

        En 360, ayant appris qu’Hilaire revenait d’exil, Martin retourna à Poitiers. Avec l’accord de l’évêque, il put enfin satisfaire sa vocation longtemps contrariée ou déçue, en s’installant dans un ermitage à 8 kilomètres de la ville, à Ligugé. Des  disciples vinrent bientôt le rejoindre, formant ainsi sous sa direction la première communauté monastique attestée en Gaule. Martin, durant les quinze années qu’il vécut dans cette retraite approfondit sa connaissance de l’Ecriture et commença son œuvre d’apostolat dans les campagnes. C’est là qu’il accomplit ses deux premiers miracles, ressuscitant un catéchumène qui s’était joint à la petite communauté, puis un jeune esclave appartenant à la domesticité d’un domaine voisin : Celui que tous tenaient déjà pour saint fut aussi tenu pour un homme puissant et vraiment digne des Apôtres, écrit saint Grégoire de Tours.

        Son renom parvint ainsi dans la ville de Tours où l’évêque Litorius venait de mourir ; les Tourangeaux souhaitèrent lui donner Martin pour successeur. Sachant son goût pour la solitude, ils usèrent de la ruse et de la force pour parvenir à leurs fins : l’un d’entre eux vint solliciter Martin de venir au chevet de sa femme, malade, disait-il. L’ascète, compatissant, le suivit et, sur la route, il fut enlevé par une troupe apostée qui le conduisit sous bonne garde à Tours. Là, les électeurs réunis, fidèles et clercs, l’acclamèrent évêque sans se soucier d’obtenir son consentement.

        Les prélats du voisinage, convoqués pour lui conférer l’ordination épiscopale, notamment l’évêque d’Angers, Défensor, montraient une certaine réticence à s’adjoindre pour collègue un homme à la mine pitoyable, aux vêtements sales, aux cheveux en désordre. Cependant, la cérémonie avait commencée, et, en l’absence du lecteur, empêché par la foule de parvenir jusqu’à l’autel, un des assistants se saisit du psautier et lut le premier verset venu : Par la bouche des enfants et des nourrissons, tu t’es rendu gloire à cause de tes ennemis, pour détruire l’ennemi et le défenseur, confondant par ce psaume l’adversaire le plus acharné de Martin. A partir de ce moment, en 371, Martin remplit les fonctions épiscopales, plein d’autorité et de prestige, sans déserter pour autant sa profession, ni ses vertus monastiques. Il s’installa un ermitage dans la solitude, à 3 kilomètres hors les murs de la ville. Dans cette retraite où il est bientôt rejoint par de nombreux disciples, s’établit un monastère, Marmoutier, dont il est l’Abbé, et où il impose à lui-même comme aux frères une règle de pauvreté, de mortifications et de prière. C’est là que s’épanouit sa vie spirituelle, dans l’humble cabane de bois qui lui sert de cellule, et où, repoussant les apparitions diaboliques, il converse familièrement avec les saints et les anges.