Apocalypse 11, 1-19

C’est la charité qui fait l’unité de tous

Saint Bernard

Apologie de saint Bernard, chapitre 4, 8-9, p. 292s

Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père. Eh bien ! De même que là-haut il se trouve plusieurs demeures dans la même habitation, ainsi ici-bas il y a plusieurs ordres religieux dans l’Eglise qui n’en est pas moins une, de sorte que si, dans l’une il y a diversité de grâce et un seul Esprit, dans l’autre il y a différents degrés de gloire et une seule et même demeure. Or, ce qui fait l’unité, tant ici-bas que là-haut, c’est la charité, et la diversité tient, sur la terre, à la différence des ordres et à la répartition des œuvres, et, dans le ciel, à la seule différence des mérites et à leur classification parfaitement ordonnée. Aussi, l’Eglise qui comprend cette sorte de contradiction en son sein, s’écrie-t-elle avec le psalmiste : Il m’a conduite par les sentiers de la justice, pour la gloire de son nom, parlant des sentiers au pluriel et de la justice au singulier, pour ne point exclure la diversité des opérations sans nier l’unité de ceux qui opèrent. Mais en même temps, comme elle a devant les yeux cette unité multipartite des cieux qu’elle doit voir un jour, elle s’écrie dans des transports de sa joie et de son bonheur : Tes places publiques, ô Jérusalem, seront pavés de l’or le plus pur et l’on chantera l’Alleluia au milieu de tous les carrefours. Or, par ces places publiques et tous ces carrefours, il faut entendre des couronnes et des gloires différentes, de même que par l’or, le seul métal dont l’écrivain sacré représente la sainte cité ornée, ainsi que par l’Alleluia qui doit y être chanté, on doit comprendre une beauté unique composée de plusieurs beautés différentes, et le même sentiment de bonheur partagé par une multitude d’esprits.

Il n’y a donc point qu’un seul sentier, parce qu’il n’y a pas qu’une seule demeure où l’on doit tendre ; c’est à chacun de voir quel sentier il doit prendre et à ne pas se tenir loin de la justice, parce qu’il y a plusieurs voies qui y conduisent ; car à quelque demeure que le sentier où nous nous seront engagés nous mène, ce sera toujours à la maison du père de la famille qu’il nous aura conduits. Cela n’empêche pas que, de même que, entre les étoiles, l’une est plus éclatante que l’autre, il en soit ainsi de la résurrection des morts. Car si les justes doivent briller comme le soleil dans le Royaume de leur Père, parmi eux, les uns brilleront plus que les autres, à cause de la différence de leurs mérites.