1 Corinthiens 3, 1-23

S’offrir en sacrifice saint

Saint Grégoire le Grand

Homélies sur Ezéchiel, SC 360, p. 523s

       Le Temple n’est-ce pas le peuple croyant ? Comme le dit à ses disciples l’apôtre saint Paul : Le Temple de Dieu est saint, et c’est vous qui êtes son Temple. L’autel de Dieu, n’est-ce pas l’âme de ceux qui vivent bien ? Se rappelant leurs péchés, ils en lavent la souillure par leurs larmes, ils mortifient leur chair par l’abstinence, font largesse de leurs biens aux pauvres, ne désirent point avoir ce qu’ils n’ont pas. Leur cœur est donc appelé avec justesse autel de Dieu, où la tristesse de la componction allume un feu, et consume la chair. Un autel est devant la façade du Temple ; là, sous le regard de la sainte Eglise, un grand nombre d’hommes, se rappelant le jugement éternel, s’immolent chaque jour en sacrifice au Seigneur par les gémissements de la componction. Ils châtient leur corps, pour accomplir le précepte du maître des nations : Afin d’offrir votre corps en victime vivante, sainte, agréable à Dieu.

       D’autres, affranchis des vices charnels et en sureté après de longs pleurs, brûlent de la flamme de l’amour, quand ils versent les larmes de la componction, mettent sous les yeux de leur âme les récompenses de la patrie céleste, aspirent être déjà les citoyens d’en haut. Ils désirent voir le Roi dans sa beauté et ne cessent de pleurer chaque jour de son amour. Ne sont-ils pas l’autel d’or, ces hommes-là, au cœur desquels brûlent des aromates, leurs ferventes vertus ? De plus, il est dit, avec raison, de cet autel, qu’il est placé devant le voile de l’Arche, dans le Saint des Saints. L’Arche du Testament, celui-là l’est devenue pour nous, dont nous savons qu’il est écrit : En lui sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science. L’Arche, à l’intérieur du voile, c’est notre Rédempteur dans le ciel. L’autel d’or sur lequel brêle l’encens devant le voile, c’est le cœur des saints : lorsqu’avec de grandes vertus s’y attise l’amour de Dieu, ils s’embrasent d’un saint désir pour celui dont ils ne peuvent encore voir la face sans voile. Entre l’Arche et l’autel, en effet, il est un voile : l’obstacle qui nous sépare encore de la vision de Dieu, ce qui est corruptible en nous n’est pas encore écarté. Mais tant que nous sommes encore devant le voile, il nous faut, comme l’encens sur la braise, brûler de la flamme d’amour. Nous ne devons rien rechercher de terrestre, rien de passager. Qu’il nous suffise, celui-là seul qui a fait toutes choses ! Par le désir, montons au-dessus de tout recueillir dans l’Un. Plus de crainte des peines, plus de souvenir de nos vices ; qu’embrasés de la flamme d’amour, nous brûlions, en larmes, avec le parfum des vertus.