2 Maccabées 7, 20-41

L’exhortation d’une mère

Saint Augustin

Sermon 300, chapitres 6 et 7, OC 18, p. 592

       Que nul, frères, n’hésite à imiter les Maccabées, parce qu’il croirait, en les imitant, ne pas imiter des chrétiens. Que les hommes apprennent à mourir pour la vérité. Que les femmes viennent se former à l’exemple de cette mère qui, par sa patience héroïque et son ineffable courage, a su conserver ses enfants. Elle sut vraiment les posséder parce qu’elle ne craignit pas de les perdre. Chacun de ses enfants a souffert le supplice, leur mère a souffert tous les tourments qu’elle leur voyait souffrir. Mère de sept martyrs, elle a été sept fois martyre. Témoin du supplice de ses enfants, elle n’en fut pas séparée, et elle les rejoignit en souffrant la mort après eux. Elle les voyait tous, elle les aimait tous d’un amour égal, la vue de leurs tourments lui faisait ressentir ce qu’ils souffraient dans leur corps, et, loin d’en être effrayée, elle les encourageait.

       Le persécuteur Antiochus pensait trouver en elle une mère semblable aux mères ordinaires. Conseillez à votre fils, lui dit-il, d’éviter la mort qui le menace. Oui, répondit-elle, je conseillerai à mon fils de sauver sa vie en l’exhortant à la mort, tandis que toi, en paraissant l’épargner, tu veux lui persuader de se perdre sans retour. Et quelles paroles admirables elle lui adressa ! Quelle tendresse ! Quel amour maternel où l’on retrouve un heureux mélange des sentiments les plus élevés de la nature et de la foi ! Mon fils, lui dit-elle, aie pitié de moi, aie pitié moi qui t’ai porté neuf mois en mon sein, qui t’ai allaité trois ans, qui t’ai nourri et amené jusqu’à cet âge, aie pitié de moi. Tous s’attendaient qu’elle allait ajouter : Fais ce que demande Antiochus, et n’abandonne point ta mère. Mais, bien loin de là, elle lui dit : Obéis à Dieu, et garde toi de te séparer de tes frères. En paraissant me quitter, c’est alors que tu ne te sépares pas de moi, car je te possèderai dans un séjour où je ne craindrai plus de te perdre ; tu seras conservé à mon amour par le Christ, dans un lieu d’où Antiochus ne pourra t’arracher. Le jeune homme craignit Dieu, il suivit les conseils de sa mère, répondit au roi et attira sa mère avec lui.

       Quel grand spectacle a été offert aujourd’hui aux yeux de notre foi ! Nous avons entendu, nous avons vu, des yeux du cœur, une mère faisant des vœux pour que ses enfants mourussent avant elle, vœux bien différents de ceux qu’inspire ordinairement la nature. Elle savait qu’elle ne perdrait pas ses enfants, mais qu’elle les envoyait devant elle, et elle considérait non pas la vie qu’ils sacrifiaient, mais celle qu’ils allaient commencer. Ils cessaient de vivre, ils commençaient à vivre de cette vie qui ne devait pas finir.