Sur Matthieu 15, 21-28

Aimer Dieu sans mesure

 

Saint Bernard

L’amour de Dieu, SC 393, p. 99s

 

Considère d’abord dans quelle mesure Dieu a mérité notre amour, ou plutôt à quel point c’est sans mesure. Disons-le en peu de mots : Il nous a aimés le premier ; lui si grand, il nous a aimés tellement, gratuitement, nous des gens si petits ! Et bien ! Pour de tels gens, la mesure d’aimer Dieu, c’est d’aimer sans mesure. Puisque l’amour qui s’adresse à Dieu s’adresse à l’immensité, à l’infinité, car Dieu est infini et immense, quelle devrait donc être, je vous le demande, la limite ou la mesure de notre amour ? N’oublions pas que notre amour à nous n’est plus un versement gratuit, mais le remboursement d’une dette. Nous sommes donc aimés par l’immensité, aimés par l’éternité, aimés par la charité qui surpasse la science, aimés par Dieu dont la grandeur est sans limite, dont la sagesse est sans mesure, dont la paix surpasse toute intelligence. Et en échange, nous allons offrir un amour mesuré ? Je t’aimerai, Seigneur, ma force, mon soutien, mon refuge, mon libérateur, et, finalement, tout ce qui peut se dire de désirable et d’aimable. Mon Dieu, mon secours, je t’aimerai pour le don que tu me fais, et, à ma mesure, bien au-dessous de ce que je dois, mais non pas certes au-dessous de ce que je peux. Bien que je ne puisse donner autant que je dois, je ne saurai aller au-delà de ce que je peux. Bien que je ne puisse donner autant que je dois, je ne saurai aller au-delà de ce que je peux. Je pourrai davantage quand tu voudras bien me donner plus, jamais cependant autant que tu en es digne. Tes yeux ont vu mes limites ; pourtant ceux-là seront inscrits dans ton livre qui font leur possible, même s’ils ne peuvent faire tout ce qu’ils doivent.

Il apparaît assez clairement, je pense, dans quelle mesure on doit aimer Dieu, et pourquoi il le mérite. Je dis : pourquoi il le mérite, car pour la grandeur de ce mérite, qui peut bien le savoir ? Qui peut bien l’exprimer ? Qui peut le goûter ?