Sur Apocalypse 1, 1-20

Apparition du Ressuscité au déporté de Patmos

 

Père Léon Ramlot

Bible et Vie Chrétienne, n° 36, décembre 1960, p. 17s

 

Moi, Jean, votre frère. Ce moi du visionnaire évoque un peu celui de Paul lorsqu’il devait défendre son ministère (2 Corinthiens), mais ici la nuance est différente, il est témoignage d’authenticité, affirmation de l’autorité prophétique (Daniel 7,28), mais le rapprochement le plus significatif nous vient des discours de Jésus, et spécialement des déclarations solennelles, Moi, Je suis, retenues précisément par l’évangéliste  Jean.

Après avoir évoqué le lieu de sa déportation, Patmos, petite île de la mer Egée, l’auteur précise la manière et le moment de son expérience divine. Jean tombe en extase le Jour du Seigneur, dont nous avons fait le Dies Domini, c’est-à-dire le dimanche, jour consacré au Christ ressuscité, jour pendant lequel se tenaient les réunions liturgiques. La vision nous présente précisément le Christ vainqueur de la mort.

Je fus ravi en esprit, déclare Jean. L’extase est ce ravissement de l’âme que connut Pierre lors de la vision de Césarée, avec le ciel ouvert, et l’apparition de la nappe avec les animaux impurs. Ce fut aussi l’expérience de Paul, de retour à Jérusalem, qui, pendant sa prière au Temple, tomba en extase devant une apparition du Seigneur, accompagnée d’un dialogue qui lui précisait sa mission auprès de païens (Actes 22,17-21). Ainsi donc, trois des principaux apôtres auraient bénéficiaient d’extases, ordonnées d’ailleurs à leur ministère propre. C’est très précisément ici une vision à écrire sur un livre à destination des sept Eglises d’Asie Mineure.

La vision s’accompagne d’audition, et l’amplitude des sons est comparée, tantôt à celle d’une trompette (v. 10), tantôt à celle du mugissement des grandes eaux (v. 15). Et au milieu des sept chandeliers, l’apôtre voit une semblance de Fils d’homme s’y promenant. Selon une symbolique essentiellement biblique, le voyant insinue un caractère divin à son personnage. L’effroi religieux est noté avec la dernière énergie : Je tombai à ses pieds comme mort. L’instant d’effroi passé, le visionnaire exprime le sentiment de confiance qui l’envahit par ce geste de la familiarité le plus amicale : Il posa sa droite sur moi. Le titre de Vivant que se donne le personnage, on sait combien il est caractéristique du Dieu de la Bible et l’attribut de Dieu dans le Nouveau Testament ; la possession des clés de la mort et de l’Hadès est une manière symbolique d’affirmer la définitive puissance du Christ sur la mort, l’Hadès étant ici la personnification de la mort. Le Fils de l’Homme manifeste alors la sollicitude qu’il porte à son Eglise dans le présent et dans l’avenir.