sur Hébreux 4, 1-13

Elle est vivante la Parole de Dieu

 

Cardinal Albert Vanhoye

La Parole qui juge, AS 59, p. 16s

 

Pour prémunir ses auditeurs contre la tentation de ne pas prendre au sérieux la Parole de Dieu, l’auteur souligne d’emblée que cette Parole n’est pas une chose inerte : Elle est vivante la Parole de Dieu. D’une chose inerte, on peut se désintéresser sans grand risque, elle ne courra pas après vous pour se rappeler à votre attention ! Mais un être vivant est plus redoutable, on ne s’en débarrasse pas à si bon compte : si on ne l’a pas traité comme il convient, il est capable de réagir avec une vigueur imprévisible ; il importe de lui donner son dû.

A l’instant où on la prononce, toute parole est vivante, car elle jaillit de la vie de celui qui parle. Elle exprime le mouvement de sa pensée, elle communique la chaleur de ses sentiments, elle transmet l’énergie de sa volonté. Mais les paroles humaines n’ont qu’une vie limitée, beaucoup s’évanouissent à peine dites. D’autres, conservées par écrit, se maintiennent plus ou moins bien dans l’existence, mais en se figeant et en devenant inertes. Leurs auteurs ne sont plus là pour les vivifier. La Parole de Dieu, elle, au contraire, est toujours vivante, car Dieu ne meurt pas et il ne cesse jamais de communiquer à sa Parole une vie toujours nouvelle.

La vie se manifeste normalement par l’activité. Vivante, la Parole de Dieu est également active, énergique même. Isaïe notait déjà qu’elle ne reste pas sans efficacité, mais réalise les projets de Dieu. Dans son activité, on peut distinguer diverses formes. L’Evangile compare la Parole à une semence capable de produire beaucoup de fruit, et saint Pierre y voit une puissance de vie qui nous a ré-engendrés. Dans le même sens positif, saint Paul définit l’Evangile comme une force pour le Salut. Notre auteur ne s’oriente pas de ce côté ; son intention est de mettre en garde contre une possible négligence ; c’est pourquoi il évoque l’autre aspect des choses : le côté terribles des interventions de la Parole. Il la compare successivement à une épée qui tranche, à un juge qui se prononce, à un enquêteur à qui rien n’échappe. De la situation générale de l’homme n face de la Parole de Dieu, l’homme se voit contraint de passer à sa situation personnelle : Nous aurons à lui rendre des comptes. La description de la Parole, on le voit, ne reste pas au niveau des théories abstraites, elle fait partie intégrante d’un acte de prédication et constitue ainsi un exemple vivant de ce qu’elle affirme : Elle est vivante la Parole de Dieu et énergique.