Sur 1 Corinthiens 12,31 – 13,13
L’amour prend patience
Saint Jean Chrysostome
Homélies sur les deux lettres aux Corinthiens, OC 17, p. 140s

Ce par quoi commence l’apôtre Paul, ce qu’il donne comme la première cause et la racine de tous les biens, c’est la patience. La patience, en effet, est la source de la sagesse. Voilà pourquoi le sage disait : L’homme patient manifeste une grande sagesse ; l’homme emporté fait preuve d’une grande folie (Proverbes 13,29). Il déclarait ailleurs la patience plus terrible qu’une ville forte, c’est une armure invincible, une tour inexpugnable contre laquelle les traits ennemis ne peuvent rien. Qu’est une étincelle tombant dans un abîme ? Elle s’éteint sans porter de dommage. Ainsi en est-il d’un événement imprévu sur une âme patiente : il disparaît sans la troubler un moment. Rien ne peut prévaloir contre la patience ; rien n’est fort comme elle. La patience nous établit dans un port assuré où nous goûtons la tranquillité la plus profonde. Qu’importent les épreuves, elles n’ébranlent pas le roc. Qu’importe les outrages que ne renversent pas la tour, qu’importe les maux qui ne peuvent rien contre le diamant. Car la charité est patiente, elle sait attendre et partout s’élever ; ces deux choses se confondent facilement. Tel est le premier avantage de la charité, source intarissable de bienfaits pour ceux qui la possèdent.
N’alléguez pas ces endurcis qui, agissant mal et s’endormant dans le mal, deviennent pire qu’ils n’étaient. La faute n’en est pas à la patience, mais au mauvais usage qu’on en fait. Au lieu de ceux-là, parlez-moi de ces âmes pleines de douceur, qui retirent du spectacle de la patience de grands avantages. Un homme qui fait le mal sans remords, en considérant la sagesse d’une âme patiente, se sentira lui-même porté à la sagesse. Quand la patience traite avec bonté, avec douceur les âmes pleines de colère, ce n’est pas pour attiser, mais pour éteindre le feu qui les consume ; elle s’efforce de soulager et de guérir les plaies de la colère, non seulement par la générosité de sa résignation, mais encore par ses soins et ses conseils. L’envie n’est pas toujours séparée de la patience, elle l’accompagne et la déprave souvent ; mais la patience, parce qu’elle est charitable, échappe à ce défaut. On peut être patient et céder cependant à l’orgueil ; par la charité, on n’a rien à redouter de semblable.