Daniel 8, 1-26

La vision et son explication

Père Jean Steinmann

Le livre de Daniel, p. 121s

 

Les anges eux-mêmes, les saints membres de l’Armée céleste sont inquiets de la victoire du monstre : Jusques à quand le sacrifice perpétuel sera-t-il aboli ? Ils s’interrogent sur la durée de cette terrible épreuve. Daniel les entend répondre.

La vision du jugement assignait une durée de trois ans et demi au règne de la Bête. Cette durée va probablement de la profanation du Temple pour aboutir à la mort d’Antiochus, soit trois ans et quarante jours. Or la durée réelle de l’interruption fut de trois ans. Les quarante jours supplémentaires ne feraient-ils pas allusion à l’Exode, au temps de pénitence qui doit s’écouler depuis le nouveau sacrifice de la Dédicace jusqu’à la reprise des relations normales entre Dieu et son peuple ?

Daniel reste perplexe devant les détails de la vision. Sur une injonction divine, un interprète angélique va venir l’instruire. La forme humaine que voit Daniel n’est pas celle du Fils d’homme de la vision précédente. C’est un ange dont il ne sait pas le nom. Alors retentit une voix, celle de Dieu lui-même, qui nomme Gabriel et lui donne l’ordre d’interpréter la vision. Gabriel va jouer auprès de Daniel le rôle que Daniel jouait auprès de Nabuchodonosor et de Balthazar.

Gabriel tenait une grande place dans la foi juive au IIème siècle avant Jésus-Christ. Le morceau de l’Apocalypse de Noé, inséré dans le récit de la chute des anges du Livre d’Enoch, nomme Gabriel avec Michel, Uriel et Raphaël.

A l’approche de Gabriel, Daniel se prosterne. Le messager lui annonce que la vision est relative au jugement eschatologique. L’idée de cette manifestation transcendante du pouvoir de Dieu terrorise tellement le voyant qu’il s’évanouit. Il est alors éveillé par l’ange. Tout le passage s’inspire du récit de la vocation d’Ezéchiel.

En clair, Gabriel explique le sens de la vision. Javan est le nom biblique de la Grèce. Le roi de Javan est Alexandre le Grand. Quand il en vient à l’explication de la signification de la petite corne qui grandit, Gabriel cesse aussitôt de s’exprimer en prose, pour se mettre à proférer un oracle à la manière des anciens prophètes. Ce poème est une satire violente du roi Antiochus. Il ressemble à un énoncé de motifs de sa condamnation devant le tribunal de Dieu. Le règne d’Antiochus est regardé comme un effet et une punition des péchés des hommes. Ce roi retors, rusé, criminel, persécuteur sans scrupules, vainc l’Egypte, mais s’enfle d’orgueil au point de s’attaquer à Dieu : alors il est brisé.