2 Pierre 2, 9-22

Nocivité, châtiment de perversité des faux-maîtres

Père Ceslas Spicq

Les épitres de saint Pierre, p. 227s

          Jésus lui-même l’avait annoncé : Il surgira beaucoup de faux prophètes et ils induiront en erreur beaucoup de monde. Depuis lors, la dénonciation des hérétiques s’exprime au futur, mais il est bien entendu que ceux-ci sont déjà à l’œuvre et bien des chrétiens sont sollicités par des doctrines variées et étranges, accréditées par des prodiges mensongers qui relèvent d’une source démoniaque. Il est impossible d’identifier le pseudo-maître dont parle cette seconde lettre de saint Pierre avec une secte historiquement connue. S’il est fait allusion à leur méthode d’enseignement, la mythologie, et à leurs critiques railleuses de la Parousie, presque rien n’est dit de leurs erreurs doctrinales. Par contre leurs vices sont abondamment dénoncés, astuce, cupidité, sensualité effrénée, comme autant de preuves de leur imposture. C’était le critère proposé par Jésus : Tenez-vous en garde contre les faux prophètes… Vous les connaîtrez d’après leurs fruits. De ce chef, dès la fin du Ier siècle, il existe une description littéraire de l’hérétique en soi, composé de clichés traditionnels et polyvalents, qui pourra s’appliquer à tous les propagandistes de mensonge ; et dont cette lettre fournit un excellent modèle. Il est étroitement apparenté à Jude, mêmes idées, mêmes séquences, mêmes phrases, même vocabulaire. Ceux qui enseignent des choses fausses sont de sombres brutes qui en savent moins que les ânes, assimilables à des chiens et à des porcs ! Cette abondance de qualificatifs malsonnants à l’égard des hérétiques, qui s’est accrue au cours des âges, notamment avec Tertullien, ne doit pas faire méconnaître la gravité des périls qui sont ici dénoncés. Rien n’a été plus précieux dans l’Eglise que la pureté de la foi, puisque c’est elle qui sauve. La violence qui traverse ces phrases est à la mesure du danger qui menace la communauté dont il est responsable. Danger de tout ce qu’il y a de plus réel. Toutes les réponses données par l’auteur de cette lettre ne satisfont pas le lecteur moderne, c’est évident. Mais il serait bon que ce dernier se demande si les dangers dénoncés dans cette épître ont tout à fait disparu de son horizon.