Actes 6,1-6 + 8,1-8

Quelle est la source de leur constance ?

Saint Bernard

Sermons sur le Cantique, sermon 61, 7-8, SC 472, p. 257s

          Si le prophète nous dit que la colombe se tient dans les trous du rocher, c’est qu’elle se tient dans les blessures du Christ avec toute sa ferveur et y demeure par une méditation  continuelle. De là vient au martyr son endurance, de là sa grande confiance dans le Très-Haut. Le martyr n’a pas à craindre de lever son visage exsangue et meurtri vers celui dont les meurtrissures l’ont guéri. Qu’aurait-il à craindre puisque le Seigneur même lui dit : Montre-moi ton visage ?

          Oui, tandis qu’il contemplera les blessures du Seigneur, le martyr ne sentira pas les siennes. Il se tient debout, exultant et triomphant, bien que tout son corps soit déchiré ; tandis que le fer lui ouvre les flancs, il regarde avec courage, et même avec allégresse le sang sacré jaillir de sa chair. Où est alors l’âme du martyr ? Sans aucun doute elle est en sureté ; comme la colombe, elle est dans le rocher, elle est dans les entrailles de Jésus, car ses blessures s’ouvrent toutes grandes pour la laisser entrer. Si elle était dans ses propres entrailles, elle sentirait certes le fer qui la pénètre, elle ne supporterait pas la douleur, elle fléchirait et renierait sa foi ; mais puisqu’elle demeure dans le rocher, le rocher qui est le Christ, pourquoi s’étonner si elle a pris la dureté du rocher ?

Ce n’est pas étonnant non plus que, exilée de son corps, l’âme ne sente pas les douleurs du corps. Ce n’est pas un effet de l’engourdissement, mais de l’amour. Les sens sont maîtrisés, non pas perdus. La douleur n’est pas absente, mais elle est dédaignée. C’est du rocher, du Christ, que vient la fermeté du martyr ; c’est de là qu’il tire la force de boire le calice du Seigneur.

Qu’il est glorieux, ce calice enivrant ! Glorieux, dis-je, et agréable aussi bien pour le chef qui regarde que pour le soldat qui triomphe. Car c’est la joie du Seigneur que notre fermeté. Comment ne se réjouirait-il pas à la voix d’une si courageuse confession de foi ? Il la demande même avec désir, en disant : Que ta voix résonne à mes oreilles. Il ne tardera pas à lui rendre la pareille selon sa promesse : Celui qui se sera déclaré pour lui devant les hommes, il se déclarera pour lui devant son Père.