Actes 28, 1-14

L’esprit de force et l’esprit de conseil, dons de l’Esprit-Saint

Saint Bernard

Sermon sur les sept dons du Saint-Esprit, OC 7, p. 98s

          Le quatrième don de l’Esprit-Saint est l’esprit de force, semblable à la quatrième Béatitude évangélique : Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, ils seront rassasiés. En effet, l’homme qui a faim et soif de la justice est fort, invincible contre toutes les adversités, dont aucune ne peut l’effrayer. Aussi Salomon a-t-il dit : Le juste est plein de sécurité comme un lion, il sera sans aucune crainte. C’est de cet esprit qu’étaient animés tous ceux dont parle l’apôtre lorsqu’il dit que les saints ont éprouvé des railleries et reçu des coups, ils ont souffert les chaînes et les emprisonnements, ils ont été lapidés, coupés, tentés, ils sont morts par le glaive. L’apôtre était aussi animé de cet esprit lorsqu’il disait : Qui nous séparera de l’amour du Christ ? L’angoisse, la persécution, la faim, les dangers, le glaive ? L’esprit de force supporte toutes les attaques de la malice d’autrui et fortifie contre les pièges de l’ennemi. Aussi l’époux, en faisant l’éloge de son épouse, dit-il : Tu es belle, mon amie, suave et belle comme Jérusalem, redoutable comme une armée rangée en bataille.

          Le cinquième don est l’esprit de conseil qui fait avoir pitié et compassion des autres ; il correspond à la cinquième Béatitude : Heureux les miséricordieux parce qu’ils obtiendront miséricorde. De là vient que Salomon a dit : L’homme porté à la miséricorde sera béni. Nous pratiquons cette vertu en trois manières principales : quand nous accomplissons les six œuvres que nous lisons dans les évangiles, quand nous nous appliquons à corriger et à ramener dans le bien ceux qui s’en sont écartés, enfin quand nous pardonnons facilement les injures qui nous ont été faites. C’est l’esprit de conseil qui a porté Dieu à s’anéantir lui-même, à prendre la forme de serviteur, afin de pouvoir ainsi corriger la brebis égarée  et la ramener à son propre bercail. C’est pour cela que l’apôtre a dit : Il s’est livré pour nos péchés, afin de nous arracher au monde mauvais actuel. Nous devons nous adonner à cette manière de conseiller. Il y a aussi une autre manière de conseiller, je veux parler de la vertu de discernement, par laquelle nous distinguons les vertus réelles de celles qui sont fausses et mauvaises ; ce don de conseil est la vertu maîtresse et souveraine de toutes les autres, elle les modère toutes, les régit d’en-haut, et les retient avec liberté, pouvoir et discrétion, afin qu’elles ne s’écartent ni à droite, ni à gauche : les vertus tiennent le milieu, elles sont alors sur le bon chemin.