Matthieu 26,14 – 27,66

Jésus meurt sur la croix

Cardinal Carlo Maria Martini

Via Crucis, p. 63s

        La sixième heure est venue, une obscurité se fit sur toute la terre, jusqu’à la neuvième heure. A la neuvième heure, Jésus s’exclama d’une grande voix : Eloï, Eloï, lema sabaktani, qui se traduit : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? Alors, parmi ceux qui étaient présents, quelques-uns disaient après l’avoir entendu : Voilà qu’il invoque Elie.

        L’un d’entre eux courut tremper une éponge dans le vinaigre, la plaça sur un bâton, et lui donna à boire en disant : Laissez, voyons si Elie viendra le descendre de là. Mais Jésus, après avoir poussé un grand cri, expira.

        Alors le voile du Temple se déchira en deux, du haut jusqu’en bas. Et le centurion qui se tenait devant lui, après l’avoir vu expirer en criant de cette façon, s’exclama : Vraiment cet homme était Fils de Dieu !

        Mourir de cette façon, Seigneur Jésus, signifie pour toi goûter amèrement le refus de tous : des grands prêtres, des anciens du peuple, des pharisiens, des scribes et aussi de la foule qui tu avais tant aimée et t’avait suivi jusque dans le désert avec une grande assiduité. C’est vrai que la foule qui voulait ta mort n’est pas la même que celle qui t’avait accueilli avec des hosannas. Mais on a toujours une certaine impression de totalité devant une foule anonyme. Tu te sens rejeté de tous ceux qui n’ont pas accueilli ton message, et de ceux qui, sous le coup de la peur, t’ont abandonné. Le projet qui t’a été confié par le Père a maintenant pour toi comme un goût d’échec tragique. Cette expérience de rejet se perpétue, aujourd’hui, dans la souffrance causée par le rejet de ton Eglise et dans la solitude de ses ministres.

        Nous voudrions t’offrir, Seigneur Jésus, notre fidélité et notre amour, et nous t’adorons, prosternés et en silence. Nous n’osons plus parler pour révéler ce que nous ressentons devant ton corps lacéré et sans vie. Nous savons que tu meurs d’une mort des plus amères par amour pour l’humanité. Nous pressentons que le mystère de l’Incarnation atteint ici son achèvement. Jésus, en se faisant obéissant jusqu’à la mort, et à la mort de la croix, nous a donné la certitude que son amour est victorieux de tout péché et même de la mort. Ainsi la Croix devient le seuil à travers lequel passent, sans arrêt, tes messages d’amour.