Jérémie 22,1-9 + 23,1-8

Seul Adam exulte

Saint Romanos le Mélode

Hymne 36, SC 128, p. 203

        Aujourd’hui s’ébranlaient les assises de la terre, le soleil altérait son éclat, n’osant pas regarder : c’est qu’on avait étendu sur une croix le dispensateur de toute vie. Le paradis était rouvert ; à cause de l’antique transgression, seul Adam exulte.

        La tyrannie de la haine est brisée, les larmes d’Eve sont taries par ta Passion, ami des hommes, Christ Dieu : en elle, le mort est régénérée ; par elle, le larron trouve un asile. Seul Adam exulte.

        Tu as pris, mon Sauveur, ma condition pour que j’accède à la tienne. Tu as accepté la Passion pour que maintenant je méprise les passions : ta mort m’a fait revivre. Tu as été mis au tombeau, et pour séjour tu m’as fait don du paradis. En descendant au fond de l’abîme, tu m’as rouvert les portes célestes. Oui, tu as tout souffert à cause du déchu, tu as tout enduré pour l’exultation d’Adam.

        Toi qui maintiens de ta main tout l’orbe de la terre, des impies t’arrêtèrent, emmenant à présent dans la cour de Caïphe celui que l’univers ne contient pas. A peine te virent-ils, ces aveugles de l’Esprit, qu’ils éclatèrent en cris de rage : L’insulteur de la Loi et de Moïse est ici ! Eh bien, quiconque honore Moïse et respecte la Loi, qu’il prouve son zèle. Pas de mollesse ! L’imposteur est venu souffrir, il l’a dit lui-même, pour l’exultation d’Adam.

        La créature de la terre périssait de soif ; consumée par la chaleur ardente, elle errait dans le désert sans eau et ne trouvait rien pour étancher sa soif, la malheureuse. Aussi mon Sauveur, fontaine de biens, a-t-il fait jaillir des flots de vie en criant : C’est de ton flanc que t’est venue la soif : bois à mon flanc, et tu n’auras plus jamais soif. Double est le torrent qui en sort : il lave et abreuve les hommes souillés, pour l’exultation d’Adam.

        Personne ne doit donc dire que le flanc du Christ était seulement celui d’un homme, car le Christ était homme et Dieu, mais sans se diviser en deux : il est un, Fils d’un Père unique. Il était le même qui souffrait, le même qui ne souffrait pas, qui mourait et ne subissait pas la mort : vivant dans sa divinité, il meurt dans son corps. Il eut pour figure le patriarche Isaac sur la montagne : celui-ci fut égorgé en l’agneau, et redescendit vivant, comme mon Sauveur, pour l’exultation d’Adam.