Matthieu 25, 31-40

Le jugement divin

Saint Jean Chrysostome

Homélie 79, OC 13, p. 95s

 

Il séparera les hommes les uns des autres, comme un berger sépare ses brebis. Dans ce monde, la séparation n’existe pas, tous sont mêlés ; mais alors se fera la séparation la plus rigoureuse, et déjà les hommes seront distingués par la place même qu’ils occuperont ; les noms par lesquels ils les désignent ensuite nous disent la différence de leurs mœurs, puisqu’ils les appellent les uns des boucs, les autres des brebis. La premier de ces noms caractérise la stérilité, puisque les boucs ne donnent aucune espèce de bénéfice ; tandis que le second est un gage de fécondité, puisque les brebis donnent la laine, le lait, les agneaux, toutes choses qu’elles seules peuvent fournir. Observons que les animaux présentent cette différence en vertu de leur nature même ; tandis que chez les hommes, c’est un effet de la volonté : d’où vient que ceux-là reçoivent le châtiment, et ceux-ci la couronne ? Du reste, la sentence n’est portée contre les méchants que lorsque leur cause est contradictoirement instruite ; aussi le Juge énonce-t-il leurs griefs après leur avoir assigné leur place. Ils répondent certes avec modestie, mais cela ne leur sert désormais de rien. Et c’est juste puisqu’ils ont précisément laissé de côté ce à quoi le Sauveur ajoutait le plus d’importance. Les prophètes eux-mêmes le disent partout et toujours : Je veux la miséricorde, non le sacrifice. Le législateur des Hébreux pousse au même but par tous les moyens, par les paroles et par les Actes. C’est une leçon qui nous est donnée par la nature.

Or, les accusés l’ont méconnue, non sur un point ou deux, mais dans tout son ensemble. Ils n’ont pas nourri le Christ quand il avait faim, ils ne l’ont pas couvert quand il était nu, ils ne l’ont pas même visité quand il était malade, négligeant envers lui le devoir le plus facile. Et voyez quel ménagement il met dans les ordres qu’il donne ! Il ne dit pas : j’étais en prison, et vous m’avez délivré, j’étais infirme et vous m’avez relevé, mais il dit simplement : Vous m’avez visité, vous êtes venus à moi. Il n’exige même rien d’onéreux pour soulager sa faim, seulement l’aliment nécessaire à la vie qu’il implore. Toutes les fois que vous n’avez pas secouru l’un des plus petits de mes frères, c’est moi que vous n’avez pas secouru. Ceux qu’il honore du nom de frères, ce sont ceux que le monde méconnaît et dédaigne.