Apocalypse 19, 11-21

Le ciel ouvert

Père Enzo Bianchi

Le monde sauvé, commentaire de l’Apocalypse de Jean, p. 279s

        Au début des visions prophétiques dans l’Apocalypse, Jean avait aperçu au ciel une porte entrouverte ; par la suite, il avait vu le sanctuaire grand ouvert et l’Arche de l’Alliance ; enfin, il avait observé l’ouverture du Temple contenant la tente du témoignage. Maintenant, avec le ciel ouvert : la révélation a atteint sa plénitude, et ce qui apparaît est la plénitude même du ciel.

        Un cheval blanc apparaît : c’est le même que nous avons rencontré au chapitre 6 et qui était une des composantes de l’histoire. Celui qui le monte s’appelle Fidèle et Vrai, deux attributs de Dieu dans l’Ancien Testament. Il juge et il combat avec justice. Cette expression nous renvoie au psaume 45, le psaume des noces du Messie, où le Messie avance vers ses noces tel un guerrier qui chevauche dans la justice et dans la vérité.

        Une fois les noces de l’Agneau proclamées, voici apparaître le Messie, l’Epoux. Celui qui vient porte plusieurs diadèmes sur la tête. Or, ce détail n’indique pas seulement la qualité messianique de celui qui monte le cheval blanc : il révèle que son pouvoir est infiniment supérieur à celui de la bête et qu’il a la plénitude du pouvoir. Un nom est inscrit sur son manteau et sur sa cuisse : Roi des rois et Seigneur des seigneurs. Son nom est la Parole de Dieu ; cependant, il porte un Nom que nul ne connaît, sauf lui. Jean sait que Dieu s’était révélé à travers le tétragramme, le mot imprononçable que seul le grand prêtre connaissait et qu’il prononçait le jour de l’expiation, le Yom Kippour, quand tous les péchés d’Israël étaient pardonnés. Avec la destruction du Temple, ce Nom, qui était la réalité la plus intime de Dieu lui-même, a été perdu et Israël ne l’a plus connu. A l’Eglise, il a été révélé uniquement comme Le Seigneur sauve, Yéhoshoua, à travers l’histoire de Jésus. Or le cavalier fidèle et vrai connaît ce Nom qui, à la fin des temps, sera manifesté à Israël aussi.

        Cette première vision de Jean apparaît directement inspirée d’un texte de l’Ancien Testament, dans le livre de la Sagesse : Alors qu’un silence paisible enveloppait toutes choses et que la nuit était au milieu de sa course, du haut des cieux, la Parole toute-puissante s’élança du trône royal, guerrier inexorable, au milieu de la terre vouée à l’extermination, portant pour glaive aigu ton irrévocable décret. Cette belle image du livre de la Sagesse décrit l’intervention de Dieu dans l’Exode : un silence profond règne sur la terre, et c’est alors que la Parole de Dieu vient. Jean reprend ici la même image : alors que tout est en suspens et se tait, dans l’attente du jugement, voici que le ciel s’ouvre, et le Verbe de Dieu vient.