Apocalypse 12, 1-18

La mort-résurrection-ascension de Jésus, un engendrement

Yves Saoût

Je n’ai pas écrit l’Apocalypse pour vous faire peur, p. 138s

        La douloureuse naissance de l’Enfant mâle et son enlèvement au ciel ne sont-ils pas le mystère pascal du Christ, mort-résurrection-ascension ? Parcourez le Nouveau Testament, vous y verrez fréquemment les apôtres ou les écrivains interpréter la résurrection de Jésus comme une naissance, un enfantement. En voici un exemple : La promesse faite aux pères, Dieu l’a pleinement accomplie à l’égard de nous, leurs enfants, quand il a ressuscité Jésus, comme il est écrit au psaume second : Tu es mon Fils, Moi, aujourd’hui, je t’ai engendré.

        Dans le quatrième évangile, pour encourager ses disciples à supporter l’affliction de la Passion, Jésus emploie l’image de la femme qui enfante : Elle est dans l’affliction, puisque son heure est venue ; mais lorsqu’elle a donné le jour à l’enfant, elle ne se souvient plus de son accablement, elle est toute à la joie d’avoir mis un homme au monde.

        Cette femme représente Israël. Les douze étoiles peuvent évoquer les douze tribus. Le soleil peut être le symbole de la gloire de Jérusalem annoncée par Isaïe : Mets-toi debout, devient lumière ; car elle arrive ta lumière : la gloire du Seigneur s’est levée sur toi. D’autres textes utilisent l’image de donner le jour, enfanter, en parlant de Jérusalem, parfois appelée Fille de Sion.

        Si la Femme de la vision tient beaucoup de traits du peuple d’Israël et de Sion, elle garde aussi de nombreux liens avec la Jérusalem nouvelle qui descend du ciel et brille de la gloire même de Dieu. Après l’enlèvement de son Fils au ciel, la Femme continue à vivre sur terre un temps d’épreuve. Ne représente-t-elle pas l’Eglise ? Cette femme, finalement, c’est le Peuple de Dieu, sous ses deux formes historiques, Israël et l’Eglise, où est né le Messie. Que vient faire ici le serpent qui apparaît ? Rappelez-vous la femme de la Genèse, le serpent, et l’homme qui appelle sa femme du nom d’Eve la Vivante, car c’est elle qui a été la mère de tout vivant.

        Ainsi cette Femme de l’Apocalypse est un peu toute l’humanité, sans cesse menacée par le Serpent-Dragon : le Messie est sa descendance. Oui, c’est l’honneur de l’humanité  d’avoir donné naissance au Messie, et tout cela se cristallise encore plus dans le Peuple de Dieu.

        Mais n’oublions pas Marie, Marie donnant naissance à l’enfant Jésus à Bethléem, mais encore Marie au pied de la croix. Marie est l’ultime personnification d’Israël et la fille de Sion, enfantant dans les douleurs le Messie crucifié et glorieux ; dans cette même scène, Jésus la présente comme la mère de ses disciples, ceux qui ont à vivre dans le « désert » de la foi, au contact de l’hostilité du monde et de Satan.