1 Corinthiens 15, 35-57

Les corps des ressuscités

Origène

Traité des Principes, III, 6, 5-6, SC 268, p. 245s

       Le dernier ennemi, la mort, sera détruit, de sorte qu’il n’y aura plus rien de funeste puisque la mort ne sera plus, ni rien de différent puisqu’il n’y aura plus d’ennemi. Il faut comprendre cette destruction du dernier ennemi, non en ce sens que sa substance faite par Dieu périra, mais en celui que son propos et sa volonté d’inimitié, qui proviennent non de Dieu mais de lui-même, disparaîtront. Il est donc détruit, non pour qu’il n’existe plus, mais pour qu’il ne soit plus ennemi et mort. Rien en effet n’est impossible au Tout-Puissant, rien n’est inguérissable pour son créateur : il a fait toutes choses pour qu’elles existent, et tout ce qui a été fait pour exister ne peut pas cesser d’exister. C’est pourquoi, si elles subissent des changements et des diversités, c’est pour qu’elles se trouvent dans un état meilleur ou pire conformément à leurs mérites. Mais les êtres qui ont été faits par Dieu pour exister et durer ne peuvent recevoir une mort qui les atteigne dans leur substance. En effet, si l’opinion du vulgaire pense que les êtres ont péri, il ne s’ensuit pas que la règle de la foi et de la vérité accepte qu’ils aient péri. Enfin si notre chair périt après la mort, au jugement des ignorants et des incroyants, de telle sorte que rien ne reste de sa substance selon ce qu’ils croient, nous, qui croyons à la résurrection, nous comprenons que c’est seulement un changement qui sera opéré par la mort, mais que la substance du corps demeure, et que, suivant la volonté du Créateur, ce corps reviendra à la vie, et qu’un nouveau changement se fera de sorte que le corps terrestre fait de terre, puis dissous par la mort et retourné en poussière et en terre, car tu es terre, dit l’Ecriture, et tu iras dans la terre, se relèvera de la terre et atteindra à la gloire d’un corps spirituel.

       Il faut penser que toute notre substance corporelle que voici sera menée à cet état, lorsque tout sera restauré pour être un et lorsque Dieu sera tout en tous. Il ne faut pas comprendre que tout cela s’accomplira d’un seul coup, mais peu à peu et par parties, à travers une succession de siècles sans fin et sans mesure, lorsque insensiblement et point par point l’amendement et la correction seront accomplis : les uns viendront en tête et tendront vers la perfection dans une course plus rapide, d’autres les suivront à courte distance, d’autres enfin seront beaucoup plus loin. Ainsi à travers quantité de degrés innombrables constitués par ceux qui progressent et se réconcilient avec Dieu, d’ennemis qu’ils étaient auparavant, on parvient au dernier ennemi appelé la mort et à sa destruction pour qu’il ne soit plus ennemi.