Esther 5,1-14 + 7,1-10

La gloire du martyre

Saint Jean Chrysostome

Homélie sur les saints martyrs, OC 4, p. 388s

 

       Sachez-le bien vous tous, le silence des martyrs est plus éloquent que tous les discours. Souvent, après avoir entretenu longtemps le peuple de la vertu, on n’aura rien obtenu ; tandis que d’autres, tout en gardant le silence, recueilleront, par l’éclat de leur vie, les meilleurs résultats. A plus forte raison, cela est vrai des martyrs ! Si leur langue reste muette, la voix de leurs œuvres retentit plus haut que celle de leur bouche, et s’adressant à l’humanité tout entière, ils lui parlent en ces termes : Jetez vos regards sur nous, considérez les maux que nous avons soufferts.

Quels sont-ils ces maux, puisque après avoir été condamnés à mort nous avons trouvé la vie qui ne finira pas ? Nous avons eu le bonheur de nous dépouiller de nos corps pour le Christ. Si, pour le Christ, nous ne nous en étions pas alors séparés, il nous aurait fallu peu à peu perdre forcément la vie corruptible dont nous étions animés. Le martyre ne nous l’aurait pas ravie, mais la mort à laquelle notre nature est vouée, fondant sur nous, nous eût condamnés à la pourriture.

Aussi, ne cessons-nous de rendre grâces à Dieu qui a daigné se servir d’un trépas absolument inévitable pour sauver nos âmes et qui a reçu de nous, comme présent, une chose que nous lui devions nécessairement, et qui y a attaché le plus grand prix. Certes les tourments sont bien douloureux et bien effrayants, mais ils ne durent qu’un instant, tandis que la félicité dont ils sont la cause dure des siècles sans fin. Et même ces tourments ne paraissent-ils en aucune façon douloureux à ceux qui considèrent les biens à venir. Parce qu’il voyait le Christ des yeux de la foi, le bienheureux Etienne ne s’apercevait pas des pierres qui pleuvaient sur lui ; il comptait, non ces pierres, mais les prix et les couronnes. Et vous aussi, détournez vos yeux du présent pour regarder l’avenir, et les maux vous trouveront complètement insensibles.