Matthieu 9, 9-13

« Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs »

Bède le Vénérable

Homélies sur les Evangiles, I, 21, PL 94, 99-101

 

       Jésus vit un homme installé au bureau des paiements des taxes, son nom était Matthieu. Jésus lui dit : Suis-moi. Jésus le vit, non pas tant avec les yeux du corps qu’avec le regard intérieur de son amour. Il vit le publicain, il l’aima. Il le choisit, et lui dit : Suis-moi, c’est-à-dire imite-moi. En lui demandant de la suivre, il l‘invitait moins à marcher derrière lui qu’à vivre comme lui. Car celui qui demeure dans le Christ doit se conduire comme lui-même, Jésus, s’est conduit. Matthieu se leva et le suivit. Rien d’étonnant que le publicain, au premier appel du Seigneur, ait abandonné sa recherche de profits terrestres et qui, négligeant les biens temporels, il ait adhéré à celui qu’il voyait dégagé de toutes richesses. C’est que le Seigneur, qui l’appelait de l’extérieur par sa parole, le touchait au plus intime de son âme en y répandant la lumière de la grâce spirituelle pour qu’il le suive.

       La conversion d’un seul publicain ouvrit la voie de la pénitence et du pardon à beaucoup de publicains et de pécheurs. Beau présage en vérité : celui qui devait être plus tard apôtre et docteur parmi les païens entraîne à sa suite, lors de sa conversion, les pécheurs sur le chemin du salut. Et ce ministère de l’Evangile qu’il allait accomplir après avoir progressé dans la vertu, il l’entreprend dès les premiers débuts de sa foi.

       Essayons de comprendre plus profondément l’événement relaté ici. Matthieu n’a pas seulement offert au Seigneur un repas corporel dans sa demeure terrestre, mais il lui a bien davantage préparé un festin dans la maison de son cœur, par sa foi et son amour : Je me tiens à la porte et je frappe ; si quelqu’un écoute ma voix et m’ouvre, j’entrerai chez lui et je dînerai avec lui et lui avec moi. Oui, le Seigneur se tient à la porte et il frappe lorsqu’il rend notre cœur attentif à sa volonté, soit par la bouche de l’homme qui enseigne, soit par une inspiration intérieure. Nous ouvrons notre porte à l’appel de sa voix quand nous donnons notre libre assentiment à ses avertissements extérieurs et intérieurs, et quand nous mettons à exécution ce que nous avons compris que nous devons faire. Et il entre pour manger, lui avec nous, et nous avec lui, parce qu’il habite dans le cœur de ses élus, par la grâce de son amour, pour les nourrir sans cesse par la lumière de sa présence, afin qu’ils élèvent progressivement leurs désirs et que lui-même se nourrisse de leur zèle pour le ciel comme de la plus délicieuse nourriture.