Galates 2,19-3,14+6,14-16

La puissance de la croix

Beaudouin de Forde

L’éloge de la foi, , p. 586s

 

       La puissance de la croix a été illustrée par des miracles et prophétisée dans des figures ; aussi, en comparant les réalités nouvelles aux anciennes, on en acquiert une idée plus profonde, une intelligence plus claire, une conception plus juste.

       C’est elle, la croix, que symbolise le bâton de Moïse, ce bâton qui, une fois jeté à terre, s’est transformé en serpent. Car le bâton insigne du pouvoir royal, renvoie au pouvoir du Christ et à la puissance de Dieu. L’apôtre en parle en ces termes : le langage de la croix est folie pour ceux qui se perdent, mais pour ceux qui se sauvent, pour nous, il est puissance de Dieu. Oui, la puissance de la croix, cachée mystérieusement, est puissance de Dieu, comme le dit l’Ecriture : Des cornes sortent de ses mains ; là est cachée sa force. Devant lui s’avance la mort, et le diable sortira de ses pas.

       Pour ceux qui sont sauvés par le langage de la croix, celle-ci constitue le sceptre qui régit, le sceptre de ton règne, ô Dieu, toi qui diriges les doux dans la droiture. Mais pour ceux qui se perdent, le bâton se transforme en serpent : la croix leur est un scandale qui conduit à la ruine. Le Christ, en effet, par l’humilité de la croix, a été placé pour la ruine et la résurrection d’un grand nombre, comme un signe en butte à la contradiction. Et pour l’Auteur de la mort aussi, la croix constitue sa ruine, puisqu’il lui advient ce que lui-même a été pour l’homme : serpent pour le serpent, mort de la mort.

       Si les puissants et les sages de ce monde se montrent rusés et pervers comme des serpents, plus grands s’avèrent le pouvoir et la sagesse de Jésus de Nazareth, le Crucifié. Car, par la puissance de la croix, il rabaisse toute hauteur qui s’élève contre la connaissance de Dieu, il met un frein à toute perversité, il rend insensée toute sagesse de ce monde. Puisque, par la sagesse de Dieu, le monde n’a pas connu Dieu par sa sagesse, il a plu à Dieu, par la folie de la prédication, de sauver les croyants. Or cette folie de la prédication, qu’est-elle sinon le langage de la croix, folie pour ceux qui se perdent. Mais c’est par elle que le monde est sauvé, par elle que toute perversité de la ruse du serpent est vaincue, grâce à celui qui a dit : Je vous ai donné le pouvoir de fouler aux pieds les serpents et les scorpions, et toute la puisance de l’Ennemi.