Sur Luc 1, 39-56

Glorifier Dieu du bienfait de la rédemption

Saint Augustin

Sermon 208, OC 20, p. 352s

 

Ecoutez, frères, écoutez dans un pieux recueillement l’hymne de notre sainte cantatrice. Ecoutons, et que nos cœurs répondent à ce sublime enseignement. Après que l’ange l’eut proclamée bénie entre toutes les femmes, toute emplie de l’Esprit-Saint, nourrie de la plénitude de Dieu, elle vint à la demeure d’Elisabeth, sa cousine, où, après que Jean eut tressailli dans le sein de sa mère, et qu’Elisabeth eut admiré la venue auprès d’elle de la Mère du Seigneur, la Vierge entonna ce magnifique chant de louanges : Mon âme rend gloire au Seigneur, et mon esprit s’est exalté dans le Dieu mon Sauveur. Il est utile de rechercher ici ce que veut dire glorifier Dieu ; la créature, en effet, ne saurait ajouter à la gloire du Créateur ! Nous devons savoir que le mot glorifier s’entend de deux manières : ajouter à la gloire de quelqu’un, ou la publier avec admiration. Dieu est glorifié par nous quand il lui agréable de l’être. Mais pourrait-il être glorifié en nous, comme il le fut en Marie dans le sein de laquelle il se revêtit de la nature humaine pour nous sauver ? Je te salue, dit l’ange, je te salue, Marie, pleine de grâce, le Seigneur est avec toi, tu es bénie entre toutes les femmes. Le Saint-Esprit descendra vers toi, et le Très-Haut te couvrira de son ombre. C’est pourquoi le Saint qui naîtra de toi s’appellera le Fils de Dieu. Pour vous, âmes saintes qui ne pouvaient posséder en vous le Verbe que par la foi, obéissez-lui par la prédication, glorifiez-le par votre amour. Le prophète David s’écrie-t-il : Rendez gloire au Seigneur avec moi, exaltons à l’envi son saint nom, comme s’il disait : chantez, publiez avec moi la grandeur de Dieu, annoncez hautement les vertus de son nom. Et encore : Mon Seigneur et mon Dieu, tu es hautement glorifié ; et pour marquer d’où lui vient sa gloire en nous, le même prophète ajoute : Votre miséricorde a été exaltée jusqu’aux cieux.

Rien n’est aussi désirable que de voir notre âme rendre gloire au Seigneur en toutes choses, posséder le Verbe de Dieu, l’enfanter, en quelque sorte, et le nourrir, se souvenant avec une reconnaissance profonde comment, par le mystère de la Rédemption, elle a été délivrée de son iniquité sans y avoir aucun droit par ses mérites passés. Rappelons-nous que notre salut est l’œuvre de la bonté seule de Dieu, au prix du sang de Jésus ; et nous nous écrierons : Mon âme rend gloire au Seigneur. Dieu a tellement aimé le monde, dit l’Evangile, qu’il a donné son Fils, son unique. L’Apôtre à son tour : Il n’a pas épargné son propre Fils, et l’a livré à la mort pour nous tous. Admirable effet, précieux élan d’un amour sans bornes ! Qui pourrait voir sans étonnement les munificences de cet amour ? Qui pourrait ne pas l’adorer dans la crainte ? Que l’âme de Marie et que notre âme rendent gloire à Dieu pour ses merveilles. Admirons, aimons, louons, adorons, rendons grâces.