sur Hébreux 5,11 – 6,8
Aparté avec les destinataires

Père Paul-Dominique Dognin
La foi de Jésus, Une lecture de la Lettre aux Hébreux, p. 61s

Les premiers versets que nous venons de lire rappellent ce que Paul écrivait aux Corinthiens (3,1-3) : Je n’ai pas pu vous parler comme à des hommes spirituels, mais comme à des petits enfants dans le Christ. C’est du lait que je vous ai donné à boire, non une nourriture solide, vous ne pouviez pas encore la supporter. La nourriture solide, mentionnée dans la lettre aux Hébreux, est évidemment la parole de justice ; or, quand on interprète ces mots à la lumière de ce que Paul dit des parfaits et de la sagesse de Dieu, on découvre que la parole de justice est très probablement synonyme de parole de la croix, où beaucoup de traducteurs mettent souvent langage de la croix.
On devient parfait par une pratique « exerçante ». Cette pratique ne diffère probablement pas de ce que l’auteur appelle l’éducation par l’endurance. En effet, il sera dit plus loin, de cette éducation, qu’elle rapporte à ceux qu’elle a exercés un fruit de paix : la justice. Cela pourrait signifier qu’elle les rend capables de goûter une parole de justice, la parole de la croix. S’ils en sont encore incapables, c’est donc, ou bien qu’ils sont trop jeunes et manquant de pratique, ils n’ont pas encore été éduqués, ou bien parce que leur pratique n’a pas encore donné de fruits pour la bonne raison que, devenus nonchalants et refusant l’endurance, ils n’ont pas vécu leurs épreuves comme une invitation à développer leur foi.
Pour mieux comprendre ce que sont le bien et le mal dont l’auteur parle ici, il faut se rappeler ce qu’il a dit du péché précédemment : le péché radical consiste à se détacher du Dieu vivant en cessant d’être participants du Christ ; ce qui, en bref, est le refus de la foi. Il en va probablement de même ici : le bien, c’est la foi, le mal, c’est le refus de la foi. Et le discernement consiste à écarter de la vie quotidienne tout ce qui pourrait impliquer un refus plus ou moins explicite de cette foi.
L’enseignement supérieur dont il est parlé ensuite aura évidemment pour objet la parole de la croix et la résurrection. Il est notable qu’ici on se détourne des œuvres mortes pour aller vers Dieu par la foi, alors que, plus loin, on se détournera des œuvres mortes pour aller vers Dieu par le culte. Cela dénote une grande parenté entre la foi et le culte.